mardi 8 avril 2014

Comment c'est / Commencer ::: un livre — Vendredi 11 avril à 20h

La revue Numéro Zéro, dont je vous ai déjà parlé ici, m'a confié une rubrique, avec pour tâche d'exposer mon travail en cours – il s'agissait donc pour moi de rendre compte de l'écriture d'un livre qui m'occupe depuis deux ans, et ce sous forme d'une rencontre/spectacle.

Comment parler d'un livre qui n'est pas fini, qui change forcément tout le temps, qui ne s'écrit pas linéairement?
Peut-on en parler sans tomber dans le discours? Peut-on faire autre chose que raconter sa gestation, ses errances, ses impasses et ses percées? Pour cela, j'ai écrit un texte:
 
 Comment c'est / Commencer ::: un livre 

que je lirai avec le comédien Bruno Blairet et le musicien Olivier Mellano

le vendredi 11 avril à 20h
aux Laboratoires d'Aubervilliers. 

Pour vous y rendre et en savoir plus, vous pouvez si vous le désirez (eh oui, le désir a ici son rôle à jouer) aller sur le site des Laboratoires d'Auvervilliers et/ou sur le site de Numéro Zéro.

Chers Parisiens, Chères Parisiennes: oui, bon, d'accord, je sais, c'est à Aubervilliers, et donc ce n'est pas dans Paris, mais rassure-toi, raisonnez-vous, et regardons sur un plan de métro: ce n'est pas si loin qu'on l'imagine. C'est au 41, rue Lécuyer, à Aubervilliers, autrement dit à six minutes à pied de la station de métro Aubervilliers-Pantin-Quatre Chemins. Sur la ligne 7. C'est deux stations après Porte de la Villette. Le spectacle est gratuit, dure à peine plus d'une heure et en plus il sera suivi d’une dégustation de vin en partenariat avec R2VINS. Alors viens très beaucoup!

Présentation du spectacle:

« Tu commences un livre. C’est une façon de parler, mais attention, ce n’est pas encore une manière d’écrire. Tu as commencé un livre. Tu es sur le seuil et tu ne vois rien, sinon du papier, du papier qui se dresse et ressemble à mur, que tu te promets de traverser. Tu voulais commencer un livre et tu as commencé un livre. Ton livre commence, il a commencé, quelque chose a commencé qui deviendra un livre, mais ce n’est pas encore un livre, pourtant ça a commencé — »

A la différence du dieu de la Genèse, l’écrivain installe son projet dans un monde en devenir, un monde qui, peut-être, n’en finit plus de finir. A lui la danse du chaos, les inquiétants pullulements, les pièges de l’orchestration. La page n’est ni blanche ni noire, elle est attraction et répulsion, partie d’un tout qu’il faut rêver puis réveiller à coups de fulgurances maîtrisées. Comment commence un livre ? Dans le bruit et la fureur ? Dans un crépitement à peine audible ? Qui commence le livre ? Claro, Blairet et Mellano sont dans un labo, les eaux montent, il faut commencer.

Derrière une barricade de papiers, qui lentement se délite, tenter de dire comment surgissent et s’organisent les éléments de ce qui cherche à devenir livre. Non pas raconter la genèse ni distiller des extraits mais donner à voir, à voir et à entendre, le bruit que fait le livre qui commence. Le travail en cours prend ici le risque de l’exposition : nul secret de fabrication, aucune recette, juste la mise en orbite d’éclats épars qui se forgent une nécessité. Le chant fêlé d’un livre, donc, mais attention : on entend encore la guitare…

Oui, car il ne s'agit pas d'extraits du livre en cours, ni d'un commentaire de son avancée — un livre, à supposer qu'il forme un tout, ne se réduit pas à ses parties. Il est d'abord pensé, senti, éprouvé dans ses intentions, il lui faut intégrer le système sensible par lequel l'écrivain aborde la question de la composition. Ecrire un livre n'est pas seulement accumuler les pages, les passages, les ratages : d'entrée de jeu, dans la naissance du projet, se heurtent et se mesurent deux dimensions distinctes: la foule des motifs et la structure organique qui leur permettra de fonctionner. Ecrire n'est pas dire; composer n'est pas raconter. Pour que le livre tienne, il importe de l'ouvrir aux possibles tout en le préservant contre les dérives. L'apprentissage de sa liberté va de paire avec des leçons de contrôle. Sa matière étant la langue, on ne peut le laisser s'ébrouer dans la pure salive. Sinon, l'écriture n'est que cochonnerie, comme disait Artaud.

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