mardi 26 janvier 2010

Reap Clara Elliott


Drôle d'effet de lire les textes de Clara Elliott, là, comme ça, tassés dans un livre, plutôt qu'entendus dans un lieu interlope, à pas d'heure… il y a longtemps. J'ai rencontré Clara via Elli Medeiros, à l'époque où cette dernière officiait dans les Stinky Toys. Il y avait ce truc appelé CRASS, qui ne m'intéressait pas trop. On a beau être ado, le côté tripes-hop (is dead), parfois, c'est lourdingue. Mais bon, Clara, quand on avait passé quelques heures avec elle, ça laissait des traces, dont on ne savait quoi faire, qui plus est. J'ai dû m'engueuler avec elle une ou deux fois, mais pour quelles raisons, allez savoir, ce devait pas être très littéraire – et si mes souvenirs sont bons, ça se passait dans un café de la rue des Canettes, Chez Georges, où je ne vais plus, peut-être un rapport. Clara Elliott une poétesse publiée? Forcément je souris, aujourd'hui. Je ne sais pas ce qui est passé par la tête de Sylvain Courtoux pour entreprendre cette anthologie. Mais peut-être suis-je furieux, rétrospectivement, d'avoir appris la mort de Clara avec au moins six mois de retard, en 1986, pile quand je publiais mon premier livre, que j'avais même pensé à lui envoyer, mais bon pas, d'adresse à l'époque. Donc, le livre est là et j'en lis des bouts. Et si les notes en bas de page m'agacent, je suis obligé de reconnaître que Clara savait écrire là où ça fait mal. Oh, les références me fatiguent toujours autant qu'à l'époque, toute cette mystique crypto-beat et para-punk, mais Courtoux a dû adapter tout ça à sa sauce, et du coup, bizarrement, ça passe encore, en force. C'est même beaucoup plus élaboré que je ne m'en rendais compte à l'époque. "La littérature a pour ambition de solidifier l'échec" ? écrit-elle page 63. Possible. Je pense que Clara cédait trop souvent au collage, mais l'époque voulait ça, non? Bref, on le voit, c'est un livre dont je ne peux pas parler comme je le fais d'ordinaire. Trop près, trop loin. C'est aussi sous-titré "leçons d'exorcisme" - et je dirai que ça tombe bien, c'est exactement ce dont j'ai besoin pour retraverser ces textes et cette époque.

Clara Elliott, Strangulation Blues – poèmes post-punk et Leçons d'exorcisme 1978-1985, suivi de Poèmes inachevés (1986-1987), adaptation et présentation par Sylvain Courtoux, Editions Al Dante. (17€)

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