samedi 1 septembre 2012

La rentrée littéraire: naïve sécession

C'est la rentrée littéraire, au cas où vous ne l'auriez pas remarqué. Une fois de plus, tous les ingrédients sont réunis. On a déjà le nom du futur Goncourt potentiel (Olivier Adam), on a déjà le scandale littéraire (Richard Millet), on a déjà l'angle d'attaque ( les écrivains s'attaquent enfin au réel, même si, bon, faudrait pas qu'ils oublient l'intime…), on a des livres sur des politiques (Zagdanski, Binet), on a le nouveau successeur de Houellebecq (Aurélien Bellanger), on a des livres sur l'inceste, la maladie et le père (mais aussi sur la mère: Mother, de Luc Lang), et puis il y a Amélie Nothomb. Grosso modo, tout se passe bien. Une dizaine de livres ont été remarqués et sortis du lot, en toute objectivité, bien sûr. Il manque un peu pour l'instant le gros truc vaguement ou faussement expérimental qu'on laisse entrer dans la salle, ainsi que le roman sur la rock-star, mais ça ne devrait pas tarder. Heureusement, d'ici quelques jours Eric Chevillard (L'auteur et moi, éd. de Minuit) va nous demander de choisir entre le gratin de chou-fleur et la truite aux amandes…
Et puis, ouf, la presse littéraire a décidé de se ressaisir. Ainsi, Transfuge ["choisissez le camp de culture"] prend un pari: "Ne trichons plus." Ce serait-y qu'ils trichaient avant? On ne sait pas. En tout cas, pour eux, durcir la ligne est impératif, car, pour citer Vincent Jaury, "l'art est une guerre de sécession, une guerre transfugéenne, la plus belle à mener selon nous, une guerre totale et quotidienne contre les clichés que la société nous impose, société dévorant si cruellement les âmes et faisant vieillir nos âmes si prématurément." On est vachement d'accord, vu qu'on n'a pas trop envie de se faire boulotter la psyché ou de ressembler à Giscard dans vingt-trois ans. Transfuge va désormais soutenir les "artistes émergents et frondeurs qui s'escriment, dans l'anonymat ou presque, à mettre en question le conformisme du monde, son conservatisme naturel." Résultat, ils nous font découvrir Les Lisières, d'Olivier Adam, "une sorte de poème en prose" et Une semaine de vacances, de Christine Angot, "réussite formelle incontestable". Fronder, émerger, ne plus tricher – respirer, expirer – le tour est joué. Transfugéen en diable, non?
Bon, si vous voulez vous radicaliser davantage, c'est facile, adhérez au "club Transfuge" et bénéficiez d'"avantages exclusifs réservés aux abonnés de Transfuge" – en plus, comme cadeau de bienvenue, on vous offrira le film sur Salinger avec  Beigbeder et un livre de Bégaudeau. Comme le dit lui-même Jaury en édito:
"Je ne vous parle pas ici, bien sûr, de ces hipsters, ces marionnettes du système, ni de ces beautiful people dont il devient chaque jour plus difficile de supporter les frasques et qui n'ont d'intérêt que de révéler le grand vide triomphant de notre époque."
Euh… Non, s'il te plaît, ne nous en parle pas.

2 commentaires:

  1. Il déchargea en déconnant.

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  2. mince j'arrive pas à comprendre si c'est ironique ou pas l'invitation à s'intéresser à Transfuge...

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